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 Sujet du message: Colloque Les arts Immersifs. 25&26 juin 2014 Nancy
UNREAD_POSTPosté: Lun Juin 23, 2014 11:16 pm 
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En construction
Comme pour mon intervention au forum de Libération à Rennes https://www.facebook.com/notes/yann-min ... 1765228149
Je mets en ligne l’élaboration de mon conducteur pour ma conférence au colloque de Nancy : Les arts immersifs par Bernard Andrieu et Anaïs Bernard. Interactions, Imsertions, Hybridations des corps pluriels.
http://corpsenimmersion.overblog.com/les-arts-immersifs 25 & 26 Juin 2014
viewtopic.php?f=3&t=7233
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Des cyborgs à la cyberesthésie. le 25 Juin à19h. Amphithéâtre Cuenot, Museum Aquarium. Nancy.

Mon intervention immersive dans le Nøømuseum, sera structurée à partir d’extraits d’articles que j’ai rédigés entre autre pour plusieurs ouvrages scientifiques, dont je donnerai les références à chaque extrait.

La conférence utilisera comme support différentes versions du Noomuseum. (un musée 3d temps réel préfigurant le futur web 3D et les nouvelles techniques pédagogiques de type E-Learning et Serious Game.
http://www.noomuseum.net/noopedagogie.html

Des versions stand alone du noomuseum seront offertes aux personnes présentes par copies via des clefs USB. Et les personnes équipées de leurs ordinateurs portables pourront m'accompagner en virtuel dans la visite des galeries du NooMuseum ...

Si la liaison internet le permet, une escale dans la version Open-Sim du noomuseum est envisageable...
http://www.noofestivalsf.com/FestivalOpenSims.html



/* --------------------------------------------1 - Corps Du Monde ----------------------------
1-Corps Du Monde : de Bernard Andrieu, Gilles Boëtsch édité chez Armand Collin
http://www.armand-colin.com/livre/45246 ... -monde.php
--------------------------------------------1 - Corps Du Monde ---------------------------- */



/* -------------------------------------------- 2- psychologie clinique 37 ---------------------
2- psychologie clinique 37 : Numéro 37 Le virtuel pour quoi faire ? Regards croisés
Sous la direction de Serge Tisseron et Frédéric Tordo.
http://www.edk.fr/index.php/actualites/ ... itions-edk
-------------------------------------------- 2- psychologie clinique 37 --------------------- */




/* -------------------------------------------- 3- MCD 59 ------------------------------------------
3- MCD 59 : Article de Yann Minh paru dans MCD (musique et culture digitale) numéro 59, Juillet Aout 2010 http://www.digitalmcd.com/
http://www.yannminh.org/english/TxtCritique310.html
-------------------------------------------- 3- MCD 59 ------------------------------------------ */



/* -------------------------------------------- 4- Pratiques intensives de l’avatar ---------------
4- Pratiques intensives de l’avatar, d’une installation immersive à la notion de cyberesthésie.
Chapitre 12 du livre “Les avatars jouables des mondes numériques.”
Théories, terrains et témoignages de partiques interactives. Sous la direction de Etienne Armand amato, Etienne Perény.
http://www.lavoisier.fr/livre/informati ... 2746232914
-------------------------------------------- 4- Pratiques intensives de l’avatar --------------- */



/* -------------------------------------------- 5- La Revue du Cube ---------------
Extrait de l'article de Yann Minh pour la Revue du Cube sur l'empathie (2011).
http://www.cuberevue.com/author/yannminh
http://www.cuberevue.com/
-------------------------------------------- 5- Revue du Cube --------------- */


Le Corps augmenté Cyberesthesique.




Je témoigne ici comme artiste, et explorateur au long cours de la sphère informationnelle, de la nøøsphère que j’arpente depuis bientôt plus de 56 ans.




/* --------------------------------------------1 - Corps Du Monde ----------------------------

Le corps cyberesthesique. Par Yann Minh. http://www.yannminh.org.


En 1998, au travers d'échanges sur le news group usenet Frasf, j'ai proposé pour remplacer les termes d'artiste multimédia et de Cyberpunk (voyou cybernétique), le néologisme "NooNaute" dont j'aimais la métaphore marine poétique. Le noonaute est un explorateur au long cours de la noosphère, la sphère de l'information et de la spiritualité.
Dans cette navigation informationnelle noonautique, mon espace de prédilection est la sphère cybersexuelle, dont j'expérimente l'érotisme et la sensualité d'outils comme la photographie, la vidéo, le téléphone, le minitel, la télédildonique, l'internet, les réseaux sociaux numériques, les avatars dans les mondes persistants.
Les mutations sociales et cognitives générées par l'évolution des NTIC incitent à inventer de nouveaux termes, pour les baptiser de façon plus adéquate. Dans mon enfance, le terme "empathie" servait à la fois à décrire notre capacité à nous projeter dans les émotions d'autrui, mais aussi cette capacité à étendre nos proprioceptions aux dispositifs que nous utilisons comme l'automobile. Mais cette signification de l'empathie a disparue sans être remplacée.
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/* -------------------------------------------- 5- La Revue du Cube ---------------
"Aux commandes de nos nooscaphes informatiques, nous projetons les limites physiques de nos corps à tout le cyberespace. Nos fonctions proprioceptives se trouvent "augmentées" par l'usage de ces outils, qui étendent et amplifient nos capacités perceptuelles individuelles à l'échelle des réseaux sociaux numériques planétaires, renforçant une forme de relation "tactile" avec la cybersphère. Comme c'est la succession de tous les points d'impacts de la matière sur la peau qui nous donne la sensation de lisse ou de rugueux, cʼest la succession de tous les points d'impacts de l'information sur notre psyché qui nous donne la sensation du monde. Grâce à la popularisation des retours de force haptiques, E-Stims, électro- mécaniques, connectés au réseau internet, les interactions avec la cybersphère ne sont plus seulement textuelles, acoustiques et visuelles, mais elles deviennent aussi physiques, sensuelles, sexuelles.
L'empathie, dans son sens actuel est "augmentée" par l'usage de ces outils, qui étendent notre sensualité à l'ensemble du réseau numérique par un processus que j'appelle "Cyberesthesie". « La sensualité cybernétique » au travers des réseaux numériques planétaires, nous permet de faire lʼamour avec lʼhumanité connectée et par feed-back cyberesthésique de ressentir dans notre chair ses caresses, comme ses morsures. " Extrait de l'article de Yann Minh pour la Revue du Cube sur l'empathie (2011).
http://www.cuberevue.com/author/yannminh
-------------------------------------------- 5- La Revue du Cube --------------- /*



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J'ai donc forgé ce néologisme : Cyberesthesie, pour à la fois nommer notre groupe de création numérique ( http://www.cyberesthesie.com/ ), mais aussi pour décrire les interactions physiques et sensuelles que nous développons avec l'immatérialité du cyberespace.

Le groupe cyberesthésie est un peu l'équipage d'un nooscaphe à bord duquel nous explorons ces nouveaux territoires émotionnels ouverts par l'évolution des technologies. Silvie Mexico est une noopilote aguerrie qui s'est depuis longtemps aventurée dans les espaces de la sexualité connectée et/ou médiée par des outils, Soizic Hess, par ses créations, réflexions, expériences de vie explore en grandeur réelle et virtuelle les voies cognitives et physiques ouvertes par le manifeste du Cyborg de Donna Haraway. Pierre Clisson est une sorte de nooplongeur de combat, expert en cyberguerre, sécurité offensive et ingénierie sociale et qui intervient depuis une dizaine d'années auprès d'institutions gouvernementales et de grands groupes, Philippe d'Albret est un cyberaccousticien qui s'aventure dans les espaces sonores du corps biologique. À nous cinq nous partageons une expérience des sensualités réelles et virtuelles qui nous ont menés à bord de notre nef cyberesthésique vers les confins immatériaux de la cybersexualité.

Nous poursuivons une exploration de l'esthétique cybernétique commencée il y a 20 ans avec mon installation media ØØØ. Car il y a une esthétique de la cybernétique, qui confère un sens au dispositif lui-même, indépendamment du contenu véhiculé ou émis. Comme dit Marshall Mac Luhan, "le message c'est le medium".
Pour moi, l'art, dans une vision cybernétique est, comme la science, un des plus hauts niveaux de traitement de l'information de l'humanité. Au travers d'une pratique de l'art numérique, je vais à la rencontre, avec le groupe cyberesthésie, des nouvelles limites de la symbiose homme machine provoquées par l'évolution des NTIC, en particulier dans le domaine de la sensualité érotique qui se retrouve augmentée par la connexion du corps aux réseaux numériques.
Nous sortons de la narcose narcissique provoquée par l'usage d'outils puissants lorsque nous atteignons les limites de nos capacités cognitives et physiques augmentées par la symbiose homme/machine, et la démarche artistique est une façon de se confronter à ces limites par la représentation, la simulation esthétique, scénographique, performative.

La salle des machines de notre vaisseau d'exploration est équipée de plusieurs systèmes de propulsion interconnectés, traditionnels, expérimentaux, originaux.
Le coeur du vaisseau est à base de micro-ordinateurs connectés en réseau, sur lesquels viennent se greffer des dispositifs à vocation cyberesthésique qui permettent des interactions physiques avec le cyberespace, en particulier au travers du cybersexe.
C'est une pratique cybernétique qui favorise le développement d'un répertoire émotionnel et sensuel spécifique et que nous avons formalisé dans le domaine artistique au travers des performances artistiques du groupe, présentées à la Demeure du Chaos, et au Totem à Nancy l'été 2011.


L'EXISTENCE AUGMENTÉE
Du fait de sa symbiose originelle avec ses outils, l'humain a toujours été "augmenté". Les vêtements, sont des outils, qui augmentent l'humain d'une protection contre le froid, et les blessures, mais ce sont aussi des outils informationnels, des parures qui émettent des signaux esthétiques, érotiques, sociaux. Comme le téléphone portable, les vêtements des origines jouaient déja un rôle synchronisation sociale, de lien social, de construction existentielle et identitaire.

Les mondes persistants, les réseaux sociaux numériques sont des outils, qui, par les qualités immersives de plus en plus "réalistes" de leurs dispositifs matériels, et logiciels, permettent de générer un espace perceptif et sensuel riche qui augmente, amplifie, étend notre relation existentielle au monde et aux autres à l'échelle planétaire.


LA NOODIVIDUATION ou la conquête des nouveaux nooterritoires.
L'usage quotidien, ou ne serait-ce que fréquent de cette nouvelle palette technique, favorise la naissance d'aptitudes cognitives et physiologiques spécifiques, que je désigne sous ce néologisme de cyberesthesie, et qui préfigure ce futur où nous serons sans doute plus sollicité au quotidien physiquement et spirituellement par l'immatérialité noosphérique que par la matérialité du monde physique.
En entretenant des relations sociales en temps réel avec d'autres humains par l'intermédiaire d'avatars numériques, nos "golems" de pixels génèrent une forme de pluralisme identitaire. En autorisant des relations sociales et émotionnelles fortes et structurantes dans une société dématérialisée, et sous une forme différente de notre apparence physique, les avatars favorisent la dividuation, c'est à dire la genèse, ou révélation des différentes identités qui forment notre "moi". L'individu étant vu dans mon propos, comme la somme des différents dividus qui composent notre identité.

Les cyborgs de pixels que sont les avatars des réseaux sociaux numériques en 2D et 3D temps réel, nous permettent d'explorer une sociabilité et une sensualité virtuelle, affranchie des déterminismes physiologiques comme l'apparence physique, mais aussi le genre. Ainsi, grâce à cette sociabilité dématérialisée dans les réseaux sociaux numériques, nous pouvons expérimenter en grandeur "virtuelle" la pertinence de la théorie Queer des Gender Studies, popularisée par le Manifeste du Cyborg de Donna Harraway, où le genre est distinct du sexe.


L'AUGMENTATION NARCOTIQUE
L'avatar s'inscrit dans la tradition multimillénaire de la créature artificielle, qui nous renvoie à nous même, et nous donne des éléments de réponse à la question fondamentale : qui suis-je ?
Lorsque, après un usage intensif de ce nouvel outil offert par l'évolution de la modernité que sont les mondes persistants avec leur population d'avatars, nous sortons de cet état de torpeur cybernétique que Marshall Mac Luhan appelle la Narcose Narcissique, nous nous retrouvons confronté à une nouvelle définition de l'humain, (en attendant le prochain paradigme qui la remplacera). Comme l'explique Philippe Breton dans son livre l'Utopie de la communication, le dernier millénaire a vu le passage d'une vision mécaniste simpliste, de l'humain "horlogerie" de Descartes, à l'humain informationnel de Norbert Wiener, et dont, pour moi, le reflet emblématique est cet Avatar numérique, prolongement immatériel de notre corps dans un espace social tout aussi dématérialisé .

Mais à la différence des trops simples robots contemporains héritiers des automates du dix-huitième siècle dont, pour l'instant la maladresse cognitive et mécanique rassure, au contraire, les sociétés dématérialisées d'avatars, en nous proposant un reflet de nous même démultiplié dans une infinie variabilité identitaire et sociale, affranchie des contingence imposée par le monde physique et les règles sociales, nous confrontent à une multiplicité existentielle et identitaire angoissante de complexité.
Les créatures artificielles immatérielles de ce début de vingt et unième siècle nous renvoient l'image d'une humanité plus diversifiée, sophistiquée, mystérieuse, et paradoxalement encore plus libre.


NOOFEED-BACK DE L'IMMATÉRIALITÉ VERS LA MATÉRIALITÉ
Par feed-back, il faut se préparer à une noocontamination du cyberespace vers la matérialité, dont les outils haptiques et télédildoniques ne sont que les prémisses. Ainsi les Nekos, Furries, Shemales, androgynes, anges, démons, transgenres, hybrides, cyborgs, chimères des mondes virtuels se "matérialiseront" par des costumes, implants, hybridations, tatouages, maquillages, greffes, bodymodifications, postures, comportements et revendications sociales et identitaires.

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Les origines du mot Cyborg.

Le nøøscaphe, ou la machine à explorer le cyberespace et la noosphère
la créature artificielle, miroir de nous-même aliénant et structurant.

l’exemple de la femme guerrière, archétype de ce que l’adolescent mâle voudrait être et qu’on retrouve dans les robots gynoïdes.
c’est à la fois un reflet “complétant” notre androgynité déficiente, mais c’est aussi une image de reproduction.
La femme est celle qui, en portant l’enfant, est l’image, le support métaphorique des concepts de perpétuation et propagation de l’espèce, ainsi le robot gynoïde de notre imaginaire contemporain comme mythique, est aussi la métaphore de la reproduction des machines.

les avatars numériques, cyborgs de pixels.
Ars Memorativa

spécificités des mondes persistants du cyberespace.
modifications spatio temporelles



/* -------------------------------------------- 2- psychologie clinique 37 ---------------------


Yann Minh : Il faut d’abord savoir que les représentations en perspective planaires sur un écran plat, une photographie, ou une toile ne sont pas “ identiques” à notre perception visuelle. C’est une technique conventionnelle de représentation inventée par la renaissance qui demande à être interprétée, malgré ses similarités avec notre perception visuelle. Pour reproduire une perception d’espace simulé proche de ce que notre système cognitif perçoit naturellement via notre système proprioceptif il faut des dispositifs stéréoscopiques immersifs sophistiqués comme “The Cave” ou “L’oculus Rift” (casque de réalité virtuelle). La transcription d’un espace 3d simulé sur un écran vidéo, par les techniques de perspectives en projection planaire, héritée de la renaissance, peut-être une forme d’abstraction difficile à formaliser pour les novices, qui sont handicapés dans un premier temps par la compréhension de cet espace métaphorique. En se familiarisant de façon ludique, par les déplacements de l’avatar dans l’espace des mondes persistants, le débutant intègre-construit rapidement une compréhension pertinente de ce type de représentation, à tel point qu’il a parfois du mal à comprendre pourquoi le design d’interaction des logiciels de modélisation traditionnels n’est pas conçu de façon similaire. Le fait d’avoir déplacé son avatar dans l’espace simulé a généré de façon ludique, et sans effort, une sorte de modèle cognitif mimétique connecté ou synchronisé avec les modèles proprioceptifs générés par notre relation “naturelle” au monde réel.
Il est alors en effet intéressant, à ce niveau, de mettre en exergue quelques différences qui me paraissent emblématiques, entre le monde informatique simulé et notre modèle proprioceptif du monde réel. Du fait, je pense, de l’interprétation en projection planaire, la perception des proportions dans le monde virtuel est “contractée”, et pour des raisons non identifiées, notre relation au temps est, à la fois physiologiquement ralentie, et cognitivement accélérée. Ainsi, Second Life, sans doute pour formaliser cette accélération temporelle de notre relation au cyberespace, est doté d’une succession de jours et de nuits six fois plus rapide que le cycle circadien réel. Une journée est de quatre heures, avec une phase diurne de trois heures et une phase nocturne d’une heure. Ce phénomène d’accélération de la succession des jours et des nuits dans le monde virtuel est symétrique d’un processus de ralentissement physiologique lié à l’usage de l’informatique, où les usagers peuvent facilement rester plus de dix-huit heures, parfois vingt-quatre heures devant un dispositif informatique en ayant l’impression qu’il ne s’est écoulé que huit à douze heures.

Cette “sédentarisation” corporelle peut d’ailleurs provoquer des déshydratations, l’utilisateur oubliant de boire ou de s’alimenter. De même, les clignements des yeux sont ralentis de moitié (certains affirment par dix), ce qui contribue à provoquer une sécheresse oculaire, ou syndrome de l’œil sec. L’accélération du cycle circadien par six dans Second Life coïncide, ou accentue une accélération des évolutions émotionnelles et sociales au sein du métaver. En particulier, j’ai constaté que les relations affectives, amoureuses, amicales ont tendance à se faire et se défaire à un rythme beaucoup plus rapide que dans le monde réel.

“Dans les mondes virtuels, la perception de l’espace est réduite et pour qu’on se sente à l’aise dans un espace 3D immersif, il faut que celui-ci soit surdimentionné par ses architectes - ou buildeurs -, d’autant plus que les utilisateurs ont tendance à donner à leurs avatars des tailles de géants. Ainsi sur Second Life et dans les Open-Sims les avatars mesurent en général autour de deux mètres trente et il faut multiplier les proportions des meubles et des espaces clos par 1,6 pour qu’ils soient perçus comme “réalistes”, alors que pour ce qui est des bâtiments, il faut multiplier par deux ou trois leur hauteur sous plafond pour qu’on s’y sente à l’aise. C’est un phénomène que je pense généré par la logique de projection planaire de la perspective héritée des règles de la renaissance, et bien sûr par le fait que nous nous déplaçons souvent, non pas dans une vue subjective, mais dans une vision à la troisième personne qui situe dans son contexte l’avatar vu de dos.

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Une des conséquences des pratiques cyberesthésiques, c’est la genèse de noodividualités exotiques.


/* -------------------------------------------- 4- Pratiques intensives de l’avatar ---------------
“12.7. La cyberesthésie : une sensation induite et anticipée
En 1998, “Nurgle” qui signera plus tard Pen Of Chaos, un ami responsable de QuakeFR (communauté française des joueurs de Quake 1/Quakeworld) et leader du clan de joueurs Santa Bartelemia, avait modélisé un niveau du jeu de tir rapide Quake en s’inspirant de mon roman ; avec une sorte d’escalier en spirale tout au long duquel des ennemis étaient positionnés, avec un vide au centre. À cette occasion j’ai pu le voir jouer une partie, et j’ai été impressionné par le fait que sa dextérité était supérieure à la vitesse de rafraîchissement des écrans vidéo. De la sorte, en se jetant dans le vide et en tirant tout autour de lui à mesure de sa chute, il manipulait son avatar avec une vitesse et une telle précision qu’il déclenchait les actions de tir en “aveugle”, sans doute à plus du centième de seconde, pour abattre ses ennemis. L’affichage allait plus lentement que ses manipulations. Plus tard Nurgle me fit ce commentaire : « Au stade de 25 images par secondes, en fait c’était encore beaucoup trop lent pour nous puisqu’il fallait pouvoir se retourner en 10 fois moins de temps pour survivre ». Il avait étendu son champ de conscience sensoriel sur l’ensemble du dispositif informatique et sur le monde virtuel avec une telle acuité qu’il pouvait compenser les lacunes du feed-back renvoyé par le son et l’image. Je suis tenté de dire qu’il était entré en empathie avec l’outil informatique via son avatar, et son processus de pilotage.



Dans mon enfance, le mot empathie, outre son usage premier pour décrire notre capacité à percevoir les émotions d’autrui, avait aussi une autre signification disparue aujourd’hui, celle de pouvoir étendre notre champ de conscience sur un dispositif, un artefact, un outil comme une automobile. Si ce sens particulier a disparu, il n’a pas été remplacé par les mots de kinesthésie21, extéroception22, proprioception23, qui se limitent à l’espace corporel biologique et à la sensation interne corporelle. C’est pourquoi pour décrire ce processus d’interaction spécifique favorisé par
21. Impression liée aux mouvements et à la préhension
22. L’extéroception correspond à la perception de stimulis extérieurs par les 5 sens. 23. Sensations corporelles liées aux organes, muscles, positions spatiales.

l’intégration du corps dans les rétroactions avec nos outils, et en particulier avec les réseaux numériques, j’ai forgé le néologisme de « cyberesthésie»24. Il vient combler l’absence de terminologie pour désigner cette capacité spécifique de notre système cognitif à pouvoir étendre nos perceptions kinesthésiques, extéroceptives et proprioceptives sur un dispositif artificiel, comme l’automobile, les systèmes informatiques, ou la plupart de nos outils courants. Certains pilotes de course par exemple, ou conducteur d’engins, connaissent très précisément, au centimètre près l’encombrement de leur véhicule.
L’usage des avatars, en intégrant une représentation de notre corps dans l’immatérialité du cyberespace 3D, génère une sorte d’ancrage cognitif qui, d’une certaine façon, nous permet d’établir des interactions et perceptions cyberesthésiques avec l’abstraction informationnelle des mondes numériques qui se matérialise de façon audiovisuelle et interactive. C’est une parfaite illustration de l’intuition métaphorique de Marshall Mac Luhan :
« Pendant l’âge mécanique, nous avons prolongé nos corps dans l’espace. Aujourd’hui, après plus d’un siècle de technologie de l’électricité, c’est notre système nerveux central lui-même que nous avons jeté comme un filet sur l’ensemble du globe, abolissant ainsi l’espace et le temps, du moins en ce qui concerne notre planète.(...) Avec l’avènement de la technologie électrique, l’homme a projeté ou installé hors de lui-même un modèle réduit en ordre de marche de son système nerveux central . » (Mc Luhan, 1968, pp.19-20)

Fort de cette connaissance progressivement accumulé en pratique et de la maîtrise des outils de création infographique en 3D, j’en suis venu à imaginer le « NooMuseum », qui est un environnement architectural consacré au partage des connaissances.

Cyberesthésie est aussi le nom d’un groupe d’art numérique, explorant les interactions entre le corps, les réseaux numériques et les mondes virtuels. En plus de moi-même, il est composé par Silvie Mexico, Soizic Hess, Pierre Clisson, Philippe d’Albret. http://cyberesthesie.com

-------------------------------------------- 4- Pratiques intensives de l’avatar --------------- */






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NooPersonnalités multiples.
La construction d’une « sociabilité virtuelle en temps réel, au travers de cyborgs numériques qui ne sont pas forcément à notre image « réelle », favorise l’apparition dans notre psyché de personnalités « étranges », « révélées » par l’utilisation des technologies immersives des réseaux sociaux numériques.

Comme le décrit si bien Marshall McLuhan dans Pour comprendre les média, l’utilisation d’un nouveau médium va modifier notre relation au réel en fonction de ses spécificités et provoquer un état temporaire de stupéfaction qu’il appelle « Narcose Narcissique ».
Souvent confondue avec de l’addiction, cette narcose narcissique qui est générée par l’utilisation d’un nouvel outil puissant, en nous mettant dans une sorte de transe réceptive, va favoriser des états de conscience modifiée et l’apparition de dividualités spécifiques, des NooGolems ou égrégores qui peuvent nous hanter ou nous posséder.

Avatars et personnages de fiction.
Pendant l’écriture de mon roman Thanatos, Les Récifs, j’ai « invoqué » dans mon esprit les héros de ma dramaturgie qui ont acquis ainsi une forme d’existence « noosphérique » plus intense. Par le biais de leur « mise en scène » dans le roman, cette « existence immatérielle » a été partagée par plusieurs milliers de lecteurs, générant par-là une ébauche « d’existence sociale » virtuelle. Les auteurs de fiction connaissent ce phénomène décrit par Pirandello qui s’est retrouvé, selon ses propres écrits, hanté par ses fameux six personnages en quête d’auteur.

Ainsi, beaucoup de héros de romans, de théâtre, de textes anciens, de cinéma — Don Quichotte, Les Trois Mousquetaires, Moïse, Sherlock Holmes, Spock, Buffy, Ripley, Don Juan, Marilyn Monroe, etc., etc. — ont acquis avec le temps cette relative forme d’existence et d’autonomie informationnelle : une noo-sociabilité.
Grâce aux mondes persistants qui permettent une interaction en temps réel, comme un acteur qui jouerait un « personnage » au quotidien, j’ai expérimenté le fait « d’invoquer » Dyl, l’héroïne de mon roman, que j’ai « incarnée » pendant deux ans dans le cyberespace, (Myspace, blog, Second Life) afin d’enrichir ma cosmogonie des Récifs par une propagation transmedia de mes héros de fiction.

Évolution cognitive et sociale.
Bien que quelques rares séries expérimentales écrites au jour le jour, par feed-back quotidien avec les spectateurs ou leur « Fanfic », permettent d’accélérer l’évolution identitaire des personnages, déterminée par la rapidité d’interaction des supports de diffusion de masse, l’évolution cognitive des personnages de fictions traditionnelles se fait très lentement. Le cinéma, les séries TV, la BD et les romans, ne permettent pour l’instant qu’une évolution cognitive et sociale des personnages très lente, au mieux d’un mois sur l’autre au fil des écritures de scénario : à la vitesse de l’évolution des plantes ou des minéraux.
Ce qui n’est pas le cas des avatars évoluant au sein des réseaux sociaux numériques. Dès sa genèse dans Second Life, comme tout avatar catapulté dans un MMORPG, Dyl est entrée en relation immédiatement et en temps réel avec les autres entités virtuelles peuplant le metaverse. Personnage de fiction « grandiloquent et caricatural », Dyl s’est mise à avoir une « existence sociale » intense. Au fil du temps, elle s’est mise à « exister » spirituellement dans mon cerveau mais aussi dans l’esprit d’un petit cercle d’humains/avatars.
Comment nous construisons nous dans le monde dit « réel », sinon essentiellement au travers de nos relations sociales ? La différence fondamentale avec un personnage de fiction traditionnelle est que les avatars interagissent au jour le jour, en temps réel, avec les créatures les plus complexes de l’univers connu, les humains. À l’épreuve de l’humanité, Dyl s’est donc sophistiquée, construite, jusqu’à atteindre une limite particulière, une frontière cognitive spécifique que j’ai fini par franchir avec elle au fil des mois : la « NooDividuation ».
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/* -------------------------------------------- 4- Pratiques intensives de l’avatar ---------------
[...] Avatars et Noodividuation
12.5. Egrégores, Les Nooentités ou la noocontamination « mémétique »
L’utilisation des avatars permet, au sein d’une relation sociale dématérialisée complexe, d’endosser des apparences physiques inspirées de créatures imaginaires comme les anges, les démons, les chimères mi-humaines mi-animales qu’illustrent bien les Nekos18, les Furries19, certains archétypes culturels hérités de notre mythologie ou de la littérature, du cinéma de la bande dessinée, comme les femmes guerrières, les hommes efféminés, les vampires...


Comme nous l’avons souligné, la différence avec le cinéma et la bande dessinée réside dans la dimension sociale communautaire interactive non linéaire et séquentielle de l’usage des avatars. Le fait d’endosser un avatar dont la représentation physique correspond à une entité archétypale provoque une sorte de contamination comportementale, espèce de mimétisme cognitif spécifique. Ainsi j’ai pu rencontrer des personnes, qui, lorsqu’elles endossaient leur avatar d’ange, adoptaient aussitôt un comportement, une façon de parler, un vocabulaire “angélique”, et suscitaient en retour un comportement adaptatif symétrique en rapport... confortant ainsi un jeu de rôle quasi automatique. L’utilisation des mondes persistants et des réseaux sociaux numériques permet aux “amateurs ” de faire l’expérience à grande échelle et ensemble de diverses figures « mythiques » ou sources d’inspiration, et ainsi de contribuer à la genèse d’entités immatérielles ayant une vie sociale et une “existence” partagée. Il existe de ce fait, ce que j’appelle un phénomène de “NooContamination” extrêmement puissant. Autrement dit, l’utilisation d’Avatars inspirés d’entités imaginaires archétypales fortes semble provoquer cette forme de mimétisme cognitif nous mettant en rapport avec des “altérités” issues de notre infosphère culturelle. Cela suit un mécanisme qui favorise le développement chez l’usager de “dividualités” originales, qui vont se trouver renforcées, complexifiées par les interactions sociales et les expériences cognitives collectives au sein du métavers ou du monde de jeu vidéo persistant. Une des particularités de cet usage quotidien au sein d’un réseau social d’une “identité” exceptionnelle, grandiloquente, archétypale est que, du fait des interactions avec les autres usagers, elle se met à “exister” indépendamment de son utilisateur dans l’esprit collectif, dans la culture, la sociabilité et la mythologie locales construite par la communauté dans laquelle elle évolue. Ainsi est générée une entité métaphorique, que la culture occultiste et ésotérique ancienne appelait un égrégore20, à savoir une entité psychique générée par le collectif humain.
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/* -------------------------------------------- 4- Pratiques intensives de l’avatar ---------------
Ma pratique intensive; quasi-obsessionnelle de la création multimédia ; qui précisément s’intéresse aux particularités de chaque média pour mieux les associer et en tirer parti ; m’a amené à forger, par feed-back avec ma propre obsession artistique, une sorte d’auto-analyse de mes motivations fondamentales. Il en résulte une théorie que j’ai baptisée « la Réponse aux Médias », ou “Noo-Feedback existentiel”. Cette réflexion, totalement subjective, n’a bien sûr aucune valeur universelle, ou scientifique, mais j’ai cependant constaté qu’elle éveille des échos familiers chez de nombreux artistes, et auteurs à qui j’ai pu en faire part.

12.3.1. La première réponse aux médias : la consommation
La première réponse aux médias passe par la consommation et l’utilisation d’objets à la fois utilitaires, mais aussi vecteurs d’informations structurantes dans notre maturation existentielle. Très vite, l’enfant des grands pays industrialisés s’entoure de médias de masse et d’objets informationnels qui expriment ce qu’il espère être ou ce qu’il pense être. Ce seront des posters, des bijoux, des disques, des CD, des DVD, des mangas, des BD, des jeux vidéo, des applications ludiques, mais aussi des outils chargés d’une forte valeur identitaire, comme les motos, vélos, skateboards, les vêtements, le mobilier, les smartphones...
Ainsi, nous entrons en relation par la consommation, mais aussi par l’exposition aux centaines de milliers de messages publicitaires ou culturels qui nous bombardent, au point que l’ensemble de ces sollicitations constitue ce que j’appelle une sorte de “méta-parent”. Les médias forment une entité informationnelle, qui en vient à former un agrégat de mèmes11, d’outils et objets informés par des valeurs existentielles et identitaires. Celui-ci nous structure, nous donne des repères et des leçons, nous informe et nous construit. Il influence nos orientations existentielles peut-être finalement d’une façon bien plus déterminante que celle de nos parents biologiques ou sociétés d’appartenance.
Voilà pourquoi, la moto, la voiture, la montre, les vêtements, les meubles, la maison, le smartphone, les équipements électroniques ... remplissent à la fois une fonction utilitaire, mais sont aussi des vecteurs de construction identitaire pour beaucoup de « consommateurs », qui, pour la plupart, se contenteront de ce premier niveau de relation cybernétique existentiel avec leur environnement informationnel. C’est ce que j’appelle « la première réponse aux médias ».

12.3.2. La seconde réponse aux médias
Mais ce premier niveau relativement passif, de “consommation” d’objets informés n’est pas satisfaisant pour certaines personnes qui vont s’efforcer de créer une relation plus interactive avec les médias de masse. C’est ce que j’appelle la seconde réponse aux Médias, dans laquelle les avatars et les réseaux sociaux épistolaires et numériques jouent un rôle majeur.

12.3.2.1. La dédicace et la rencontre avec « l’avatar » de l’auteur
La dédicace par exemple est un protocole social qui nous permet relativement facilement d’entrer en relation avec l’un des avatars mass-médiatique d’un auteur, que cela soit un livre, un film, une chanson, qui a joué un rôle important dans notre construction existentielle. Il y a une impossibilité pratique pour les artistes populaires à partager réellement leur intimité avec leurs milliers ou millions de fans, mais, heureusement, il existe une sorte de consensus tacite : ce n’est pas l’auteur, ou la star que ceux-ci s’efforcent de rencontrer, mais surtout son personnage public, qu’on peut considérer comme étant son avatar médiatique, l’entité virtuelle qui nous a accompagnés pendant notre maturation. Ce que veulent les fans, c’est avant tout se faire “reconnaître”, même brièvement par exemple par l’avatar bien connu de Veronica Louise Ciccone, qui est Madonna. Car ce n’est pas Veronica Louis Ciccone qui a contribué à leur construction existentielle, mais bien la “nooentité”, pour reprendre par ce préfixe mon vocabulaire, la créature informationnelle masse médiatique, excessive, grandiloquente, caricaturale, emblématique qu’est Madonna.
Ainsi, autre exemple d’avatar artistique, le dessinateur Jean Giraud, lorsqu’il a commencé à réaliser des œuvres originales personnelles a inventé le personnage de Moebius.

11. La théorie des mêmes a été développée par le biologiste et éthologie Richard Dawkins. Il désigne des formes culturelles identifiables capables de se diffuser par réplication et imitation.


Lors d’entretiens que j’avais eus avec lui dans le cadre de la réalisation d’une série de documentaires pour Arte et M6, j’avais été surpris entre les prises de vues d’entendre Jean Giraud me parler de Moebius à la troisième personne. Pour Jean Giraud, Moebius était perçu comme une sorte de créature artificielle immatérielle distincte de son identité biologique. L’avatar Moebius en signant l’autographe via son entité biologique réelle (Jean Giraud), signifiait à celui qui était venu chercher cette dédicace : « Par cette signature et ce pacte, je te reconnais. En ce bref instant, toi, créature matérielle, tu existes pour moi créature immatérielle qui a contribué à ta construction existentielle. ».
Ainsi, une simple signature par une idole permet d’évacuer l’éventuelle souffrance d’une négation existentielle grâce à la reconnaissance symbolique d’un avatar au sens métaphorique, d’une créature artificielle immatérielle qui établit une jonction entre la cybersphère informationnelle et la biosphère où évolue notre corps biologique. Notre relation aux mass-médias est en partie déterminée par cette quête existentielle : la recherche d’une reconnaissance de ce méta-parent généré par la myriade d’objets et messages informationnels qui ont contribué à notre construction identitaire.

12.3.2.2. Le plateau télévisuel et la preuve par l’image télédiffusée
Nos sociétés vont d’ailleurs répondre à ce besoin de reconnaissance médiatique en fournissant des outils, ou services facilitant ce feed-back existentiel, dont le plateau de télévision est emblématique. Nombre de gens s’efforcent de participer à un « plateau télé », soit en tant que spectateur, soit en participant à des jeux télévisés, car c’est une façon rapide et organisée d’acquérir une forme de reconnaissance existentielle masse médiatique. Cette nécessité de pouvoir “exister”, même brièvement, dans l’un des plus grands espace masse médiatique d’une nation est largement exploité par l’industrie télévisuelle, en particulier au travers des émissions très populaires des « reality shows » et autres téléréalités, au sein desquels les participants apprennent rapidement à distinguer leurs “avatars” médiatiques de leur “identité” biologique.

12.3.2.3. Les réseaux sociaux numériques, véhicules de reconnaissance existentielle
Après les fanzines, la radio amateur, la CB12, la télévision et le minitel, l’internet est un nouvel outil de “réponse aux médias” performant. Les BBS, les blogs, les sites web, et les réseaux sociaux numériques permettent en masse de pouvoir “répondre aux médias” directement. Grâce à ce dispositif d’envergure mondial, à moindre coût et relativement facilement, l’internaute peut exorciser la frustration d’une non-existence masse médiatique en projetant son identité par avatars interposés dans les zones de convivialité du cyberespace. La popularisation de l’internet à la fin du 20e siècle m’a ainsi permis de pouvoir créer en 1997 mes premières galeries virtuelles en 2D via mon site web, et d’exposer mes œuvres dans un espace accessible à la planète entière. Ainsi, en contournant le contrôle institutionnel des musées, festivals et galeries qui refusaient de diffuser mes créations du fait de leur esthétique cyberpunk de science-fiction, et surtout en raison de mes références au fétichisme et aux sexualités alternatives, j’ai pu aller à la rencontre de mon public via le cyberespace. Cela m’a littéralement “sauvé”, car je percevais l’impossibilité de pouvoir exposer publiquement, de “répondre aux médias” comme une négation existentielle qui pouvait engendrer un état dépressif, que l’on sait souvent fatal.

12.3.3. La troisième réponse aux médias, fabriquer un avatar artistique diffusé en masse
La troisième réponse aux médias est la plus difficile à mettre en œuvre. Comme beaucoup d’autres auteurs ou artistes, je m’inscris dans cette démarche de vouloir "vraiment" faire suite aux stimulations médiatiques reçues, en apportant des contre-propositions conséquentes.
Consommer de façon passive des objets informés, être présent sur les plateaux TV, ou communiquer sur les réseaux sociaux numériques demeure quelque peu superficiel et toujours très encadré. Pour aller au-delà, l’enjeu existentiel est de “produire” à mon tour un “avatar” aussi riche, puissant, influent que ces entités informationnelles qui nous ont construits dans notre enfance et adolescence.
Nous espérons alors inscrire notre identité dans la sphère des mass médias sous la forme d’une œuvre ou action artistique, assimilée dans mon propos à un « avatar métaphorique de soi », et qui pourrait être diffusée en masse. Pour cela, il s’agit de mettre en place des stratégies pour s’emparer d’outils de communication de masse, comme le cinéma, la vidéo, l’écriture de romans, la bande dessinée, l’illustration, la musique électronique, le jeu vidéo, etc.
Les artistes sont des explorateurs des mondes de l’information. L’enjeu artistique pour moi, c’est d’aller explorer des espaces cognitifs difficiles d’accès, voire dangereux pour les “Noo- Explorateurs” non expérimentés. Au début de notre carrière artistique, nous avons tendance à emprunter en toute sécurité les voies balisées des productions commerciales audiovisuelles, graphiques ou littéraires, pour nous faire reconnaître et valoir. Ainsi, lorsque je réalise mes documentaires TV, je suis une sorte de Noo-capitaine financé par les sociétés de productions pour fabriquer et livrer du Noo-Hamburger audiovisuel à travers la planète. On nous confie les commandes de ces énormes nooscaphes que sont les studios de télévision, de publicité ou de cinéma pour livrer des productions informationnelles normalisées, mais évidemment sans trop dévier des routes commerciales balisées. Du fait de cette inertie noosphérique, les artistes sont souvent obligés de construire leurs propres outils d’exploration, leurs propres nooscaphes pour atteindre les secteurs cachés de la sphère informationnelle situés en dehors des grandes voies commerciales. Dans cette quête noosphérique liée à l’art, nous ne pouvons que nous mettre en danger spirituellement en transgressant les valeurs morales, sociales ou esthétiques. Et cela, à travers un des phénomènes cognitifs parmi les plus spectaculaires que j’ai expérimentés par une pratique intensive de l’avatar dans Second Life.
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12.2. L’addiction aux avatars ou la narcose narcissique
Une des meilleures façons que je connaisse de vulgariser ou d’illustrer le concept de « narcose narcissique » de Marshall Mc Luhan est d’analyser notre relation à l’automobile, qui est un outil sophistiqué déjà ancien. Nombreux sont ceux qui ont déjà succombé un temps à son pouvoir en apparence « addictif », en conduisant des heures, des jours parfois le long des réseaux routiers du monde réel, simplement pour le plaisir de piloter cette prothèse surpuissante ou d’être grisé par les vertiges de la vitesse. Parfois, l’addiction à l’automobile va entraîner le conducteur vers des comportements extrêmes pouvant s’avérer fatals, ou encore vers un investissement existentiel radical comme celui des designers, des sportifs, des collectionneurs... Toutefois, le plus souvent, le phénomène de "possession" narcotique exercé par l’usage de l’automobile va disparaître de lui- même au bout de quelques années, ou juste quelques mois, lorsque le conducteur aura atteint les limites du symbiote6 humain/automobile, c’est-à-dire quand aura cessé la narcose narcissique.
De quoi s’agit-il ? Référons-nous à la description qu’en fait Mc Luhan : « Le jeune Narcisse prit pour une autre personne sa propre image reflétée dans l’eau d’une source. Ce prolongement de lui- même dans un miroir engourdit ses perceptions au point qu’il devint un servomécanisme de sa propre image prolongée répétée .../... Ce qu’il y a d’intéressant dans ce mythe, c’est qu’il montre que les hommes sont immédiatement fascinés par une extension d’eux-mêmes faite d’un autre matériau qu’eux."7 Pour ce penseur des médias et de la technique, les outils sont des extensions de nous- mêmes qui, en amplifiant nos fonctions physiques ou cognitives, provoquent un état de stupéfaction spécifique : comme Narcisse est stupéfait par son propre reflet, nous sommes stupéfaits par le reflet du cyborg que nous devenons lorsque nous utilisons un outil puissant qui nous transforme, en nous « amplifiant ». Ceci est d’autant plus vrai pour les avatars, qui s’offrent en un reflet déformé de nous-mêmes.

6. Le symbiote est un organisme s’associant à un autre de façon utile et harmonieuse à chacun, avec un bénéfice mutuel.
7. Marshall Mc Luhan (1964), dans la partie « L'amour des gadgets ». Narcisse la narcose


Lorsqu’on adopte cette perspective sur les relations que nous entretenons avec nos outils, il convient de se poser la question : quelle capacité l’outil amplifie-t-il ?
Ainsi, pour en revenir à l’automobile, en tant que prolongement de nous-mêmes, elle apparait comme une extension des jambes. C’est une prothèse, un outil qui sert à amplifier la fonction de marcher ou courir. Mais en même temps que l’automobile amplifie la fonction de courir, son utilisation va générer ces phénomènes cognitifs spécifiques, dont la Narcose Narcissique.
« Narcisse est hypnotisé par le prolongement et l’amputation de son propre être dans une forme technologique nouvelle. » (Mc Luhan, 1964, p.29).
L’utilisation d’outils n’est pas neutre, car en amplifiant une partie de nous-mêmes, chaque outil va provoquer cet état de stupéfaction relatif à la fonction physique ou cognitive qui est amplifiée. L’appareil photo et la caméra vidéo sont surtout dans leurs utilisations les plus populaires des extensions de la mémoire. Le syndrome de la narcose narcissique se caractérise alors dans ce cas par une manie de la captation. Un besoin incoercible de filmer ou photographier en permanence l’éphémère, chaque instant d’un voyage, d’un événement, d’une émotion forte, au risque de ne plus "vivre" ou "exister" qu’à travers l’acte de filmer ou photographier. Or, comme des couteaux suisses, les jeux vidéo et les mondes persistants sont un regroupement d’outils amplifiant des fonctions cognitives différentes et augmentant l’état de stupéfaction de la narcose narcissique. De ce fait, il faudra davantage de temps avant d’atteindre les limites de ce corps cybernétique complexe que nous devenons en conjuguant informatique, réseaux sociaux et avatar.
Cet état de narcose narcissique que peut provoquer l’utilisation intensive des avatars génère des similitudes comportementales avec les états addictifs provoqués par certaines drogues, qui peuvent inquiéter les proches. En effet, en état de narcose narcissique les explorateurs des mondes virtuels peuvent rester devant leurs écrans informatiques plusieurs journées consécutives, comme des conducteurs novices roulant inlassablement dans la nuit des autoroutes, ou de jeunes marins naviguant sur les mers en solitaires en quête d’une meilleure compréhension des cyborgs qu’ils sont devenus. Cette prise en compte des effets d’une transformation profonde, mes œuvres en témoignent, comme dans mon film NooGenesis, où le constat résonne de façon mélancolique : « Fusionnant avec nos unités centrales et nos microprocesseurs robotisés, nous nous immergions avec délectation dans les réseaux des réseaux à la recherche de ce que nous étions devenus sans avoir jamais compris ce que nous étions déjà. »8
Selon mon expérience et les nombreuses conversations à ce sujet, la différence entre une réelle addiction et la narcose narcissique, c’est qu’une fois atteintes les limites de ce que nous sommes devenus avec ces greffes technologiques, nous sortons de cet état de stupéfaction sans dommages cognitifs. Au contraire, nous revenons au monde, plus forts d’une expérience nouvelle. Comme un dormeur sortant de ses rêves, nous émergeons affranchis de la fascination et de notre dépendance à l’outil, car nous le « maîtrisons ».
Dans l’état de narcose narcissique, nous souffrons surtout d’un besoin de compréhension... compréhension de l’outil, de ce que nous sommes devenus grâce à lui, et peut-être aussi, compréhension de notre entourage. L’utilisation des nouvelles technologies, des avatars, des entités que nous créons lorsque nous nous emparons de ces nouveaux outils, nous confronte à des êtres fabriqués à notre image, qui par effet miroir nous questionnent sur ce que nous sommes. Les avatars sont pour moi des créatures artificielles faites de pixels que nous téléopérons dans le cyberespace pour nous construire existentiellement dans une relation sociale dématérialisée via les réseaux

8. Extrait de la nouvelle de Yann Minh “Le NooNaute” (2007) et film disponible sur http://www.yannminh.org/french/CtNooGenesis.html

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/* --------------------------------------------1 - Corps Du Monde ----------------------------
ETYMOLOGIE
Cyber Esthesie, Cyber = Cybernetique, qui vient de Kubernetike, l'art de piloter le navire, utilisé par Platon comme métaphore pour décrire l'art de diriger la cité, mais c'est surtout son utilisation par le Mathématicien Norbert Wiener entre 1942 et 1948 pour désigner sa "science du commandement" et ses applications dans les domaines de la robotique et du vivant qui donnera le sens actuel du terme...
En gros, peut être considéré comme "Cyber" tout organisme ou système, ou artefact qui établit un processus de "rétro-action" dynamique avec son environnement (feed-back) via traitement informationnel... nous sommes donc tous des organismes cybernétiques...
http://fr.wikipedia.org/wiki/Cybernetique

Esthésie = aptitude a percevoir des sensations...
Un dispositif comportant un système d'immersion virtuel, une souris haptique, des télédildos, des E-Stims sont des dispositifs cyberesthesiques… car ils permettent de restituer à l'utilisateur, outre les sensations auditives et oculaires traditionnelles, des sensations physiques...

LA SALLE DES MACHINES DU NOOSCAPHE DE CYBERESTHESIE
La souris haptiques qui restitue les sensations tactiles de lisse ou rugueux, les chocs, la dureté, le poids et la masse des objets virtuels manipulés.
L'EEG (Brain computer interfaces ou interfaces neurales directes ) qui permet d'interagir avec des dispositifs informatiques via la pensée.
Les E-Stims en réseau, qui permettent de recevoir des stimulations électriques depuis les mondes persistants et les FPS.
Les télédildos, qui permettent de recevoir des stimulations sexuelles depuis les métaverses.
Les vestes haptiques, qui permettent de recevoir sur le corps des chocs synchronisés avec des événements dans le cyberespace.
Les simulateurs de mouvement sur vérins à 3 ou 6 degrés de liberté. (6 DOF)

--------------------------------------------1 - Corps Du Monde ---------------------------- */













/* --------------------------------------------1 - Corps Du Monde ----------------------------
1-Corps Du Monde : de Bernard Andrieu, Gilles Boëtsch édité chez Armand Collin
http://www.armand-colin.com/livre/45246 ... -monde.php
--------------------------------------------1 - Corps Du Monde ---------------------------- */



/* -------------------------------------------- 2- psychologie clinique 37 ---------------------
2- psychologie clinique 37 : Numéro 37 Le virtuel pour quoi faire ? Regards croisés
Sous la direction de Serge Tisseron et Frédéric Tordo.
http://www.edk.fr/index.php/actualites/ ... itions-edk
-------------------------------------------- 2- psychologie clinique 37 --------------------- */




/* -------------------------------------------- 3- MCD 59 ------------------------------------------
3- MCD 59 : Article de Yann Minh paru dans MCD (musique et culture digitale) numéro 59, Juillet Aout 2010 http://www.digitalmcd.com/
http://www.yannminh.org/english/TxtCritique310.html
-------------------------------------------- 3- MCD 59 ------------------------------------------ */



/* -------------------------------------------- 4- Pratiques intensives de l’avatar ---------------
4- Pratiques intensives de l’avatar, d’une installation immersive à la notion de cyberesthésie.
Chapitre 12 du livre “Les avatars jouables des mondes numériques.”
Théories, terrain
s et témoignages de partiques interactives. Sous la direction de Etienne Armand amato, Etienne Perény.
http://www.lavoisier.fr/livre/informati ... 2746232914
-------------------------------------------- 4- Pratiques intensives de l’avatar --------------- */


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